J’ai découvert, glissée entre deux pages
Une photo de vous, nu
En vous voyant passer dans le village
Je vous ai reconnu
Je lis la gêne sur votre visage
Excusez mon phrasé malvenu,
Mais soyez rassuré, à part moi je crois que nul n’a vu ce curieux marque-page
J’ai emprunté à la bibliothèque
Ce manuel, un jeudi
J’ai toujours rêvé d’apprendre le grec (et puis…)
Ça alors, vous aussi ?!
Je pensais bientôt visiter Athènes
Et puis mon vol n’est jamais parti (vous savez)
Les frontières ont fermé, les coiffeurs, les cafés aussi, chacun chez lui restait sage
Bref, plus question de partir en voyage
(Et comme vous) je me suis confiné
Pour tuer le temps, j’ai épluché l’ouvrage
Où vous dormiez caché
De ma curiosité, je fus l’otage
Alors sur les réseaux, j’ai fouiné
Sans succès, jusqu’ici vous semblez échapper par magie aux grands marchands d’images
J’ai spéculé, tournoyé dans ma cage
Qu’était-il advenu
Pour qu’on laissât traîner entre deux pages
Une photo de vous, nu
Était-ce un oubli sincère ou bien l’accès de rage, d’un ex-amant déçu
Vengeur lâche et masqué qui vous aurait ainsi trahi, ciel, quel odieux personnage
Peut-être encore que vous avez laissé
À dessein ce portrait
Pour s’amuser, choquer, émoustiller
Je chauffe ? Vous souriez !
Depuis février que je m’ensauvage
À rêver, dans mon terrier reclus
Dans le noir mon regard s’est perdu, de votre selfie nu j’ai fait mon paysage
Je vous le rends, griffonnant au passage
Mon numéro dessus
À très bientôt, n’en prenez pas ombrage
Si je reste vêtu